Jadis naquit, du coma des maquis,
en rang d’oignons, sans rébellion,
bataillons de majorettes en treillis
et bitraillettes en tourbillon !
de clan d’automates en plan vigipirate,
voici venue l’insurrection !
Ci-gît la Venus aux pétitions bidons,
fébrile, son embryon,
fronde ombilicale, calanche sous les crampons
ahurie, ébahie
grisée de ses cris, en plein émoi
la très sainte Patrie, stressante carie aux abois,
donne la messe, carillonne les noces,
des grossesses et des coups de crosse.
…
neurones à ras, harassés de testostérone,
ronronnent sous les bérets et braient, saoulés d’hormones.
Gare du nord
La scène se déroule sur les devants de la Gare du Nord, je clopais dans l’attente du prochain train pour Compiègne. Une jeune sans abri, âgée de 17 ans environ et enceinte de 5 mois au moins, vu la taille de son ventre, distribuait ses éternelles pétitions bidons dans le but de récolter quelques rapines pour se sustenter.
Les passants l’évitaient, agacés de se faire tout le temps alpaguer par les SDF, les sans-pap’, les manouches…
Je clopais toujours lorsque trois beaux militaires, bien virils dans leurs uniformes, le fusil à l’épaule, interpellèrent de manière subtile la jeune demoiselle.
Le premier un peu timide lui saisit le bras, le second un peu moins sage lui titilla les genoux avec le canon de son arme, le troisième encore moins sage, à grand coup de crosses lui caressa son ventre bien rond où le fœtus devait faire des loopings.
La jeunette essaya de se dégager, mais le premier maintenait fermement sa poigne sur son bras, elle hurlait.
Une autre dame assistant à la scène se joignit à moi pour leur demander, timidement, de cesser. Ils finirent par la relâcher, l’un d’eux la suivant encore sur quelques mètres, une lueur sadique dans le regard.
Les autres spectateurs semblaient totalement indifférents à ce spectacle poignant, à peine y jetaient-ils un regard vaguement gêné.
Moi non plus je n’ai rien fait, ou si peu… La haine me brûlait pourtant le ventre, j’aurais voulu leur arracher le fusil des mains et leur coller une balle en pleine gueule, mais je n’ai rien fait ; je me suis juste haï en silence, je me suis haï d’avoir été aussi lâche, je me suis haï de m’être laissé soumettre par la peur. La peur de leur fusil, et ce qui est peut être pire encore, la peur des poursuites judiciaires que j’encourais à insulter un représentant de la loi.
Deux semaines ont passé, la haine m’a quitté peu à peu, elle a laissé place à des questions que je souhaite vous adresser aujourd’hui.
Est-il normal que nous ayons peur des hommes sensés assurer notre sécurité ?
L’humanité est-elle à sacrifier sur l’autel de la sécurité ?
Quels mécanismes, dans la formation de ces hommes, les ont acheminés vers une telle détestation de leurs semblables ?
Car ce ne sont pas des monstres qui se sont adonnés à cet acte de barbarie, ce sont des hommes… de même que les passants et moi même qui avons gardé le silence, nous rendant complice de cet acte.
Alors que faire ? Témoigner ? Est-ce suffisant… Se dresser devant ces hommes ? Pour finir en prison…
« L’Etat détient le monopole de la violence légitime » (Max Weber)
Version distribuée (avec les dessins!): Gare du Nord